Pour pouvoir s’installer dans des locaux qui font déjà l’objet d’un bail commercial, il arrive que l’entrepreneur soit amené à acheter un droit au bail, souvent confondu à tort avec le pas de porte. Il s’agit pourtant de deux notions bien distinctes.
De quoi s’agit-il exactement ?
Quelles sont les conditions de cession du droit au bail et son traitement fiscal ?
Chez Revenus-Locatifs.com, nous sommes nombreux à avoir investi à titre personnel dans l’immobilier locatif commercial et nous allons aborder les points essentiels qui permettent de comprendre et maîtriser le droit au bail.
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- Le pas de porte ou droit d’entrée
Le droit au bail consiste, à la reprise d’un bail commercial, à racheter à l’ancien locataire du local commercial (le cédant) son bail en cours.
Cela permet au nouveau locataire (le cessionnaire) de bénéficier de conditions plus intéressantes que celles du marché.
Son intérêt est de garantir, durant toute la durée qui reste à courir dans le bail initial, un montant de loyer plus avantageux, même si le versement du droit au bail corrige cette différence entre le prix pratiqué et le prix du marché.
Le loyer ne peut être révisé que par période triennale (révision plafonnée) ou selon une autre périodicité de révision précisée dans le contrat (clause d’échelle mobile).
Le locataire peut demander le renouvellement du bail à son expiration, ce droit au renouvellement étant inscrit dans les baux commerciaux.
Lorsque l‘ancien et le nouveau locataire se succèdent, le locataire sortant peut vendre ce droit de renouvellement du bail.
C’est par l’acquisition du droit de bail que le locataire repreneur acquiert la propriété commerciale.
On entend par « propriété commerciale » le droit du locataire, au terme du bail, d'obtenir son renouvellement, ou, à défaut, le paiement d'une indemnité d'éviction.
La cession du droit au bail ne conduit pas à la conclusion d'un nouveau bail.
Les obligations restent inchangées, car le cessionnaire (nouveau locataire) prend la place du cédant (locataire initial) pour la durée restant à courir dans le bail.
Par conséquent, le bail commercial est toujours le même, mais ce sont les parties au contrat qui changent.
De plus, le changement de titulaire du bail ne constitue pas un motif suffisant pour déplafonner le loyer.
Il est fixé par la loi du marché et évolue en fonction de l’attractivité commerciale du local, de la zone, ainsi que de la durée du bail avant son expiration.
Intervenant comme une indemnité compensant la sous-évaluation du loyer lors de la cession du bail, son montant sera d’autant plus élevé que le loyer est faible et la durée avant la fin du bail élevée.
« Le droit au bail ayant une valeur patrimoniale, il est cédé moyennant le paiement d'une indemnité prévue dans le contrat de cession de bail.
La valeur du droit au bail n'est pas liée au chiffre d'affaires, ni au bénéfice. Elle est négociée par les parties qui décident par la suite du prix. Celui-ci sera mentionné dans le contrat de cession de bail commercial. »
Service-Public.fr
Le bailleur peut poser ses conditions à la cession du droit de bail, ainsi qu’une clause d’agrément.
Il n’a cependant pas le droit de s’y opposer lorsque le locataire sortant exerce la même activité avec une même clientèle que le locataire entrant.
Cf. plus bas le chapitre « Quelles sont les conditions de cession et d’apport du droit au bail »
Lors de la cession du bail, certaines formalités doivent être respectées.
« Un état des lieux doit être établi par le bailleur et le locataire sortant.
La cession doit être notifiée au bailleur par voie d'huissier pour lui être opposable, sauf si la cession est acceptée par le bailleur dans l'acte de cession lui-même.
En cas de non-respect des formalités de cession, la cession ou la vente du bail ne peut pas avoir lieu. Le non-respect peut également entraîner la résiliation et/ou le non-renouvellement du bail. »
Interieur.gouv.fr
Les parties concernées par le droit au bail et le pas-de-porte sont différentes
Comme nous venons de le voir, il s’agit de la somme versée par le locataire entrant au locataire sortant.
Le locataire sortant doit la déclarer au titre des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).
Le locataire entrant doit la déclarer comme actif au bilan.
Il s’agit de la somme versée par le locataire au propriétaire du local.
Le régime fiscal de la qualification juridique de cette somme dépend de sa qualification juridique.
Se reporter à notre INDISPENSABLE Le pas de porte ou droit d’entrée
Le droit au bail est un élément du fonds de commerce appartenant au locataire.
On entend par fonds de commerce « l’ensemble d'éléments concourant à constituer une unité économique dont l'objet est de nature commerciale comprenant des éléments corporels, tel que le matériel, les marchandises et les équipements, et des éléments incorporels, tels que la clientèle, l’achalandage, le droit au bail et le nom commercial.
Le fonds de commerce est un « meuble incorporel » au sens juridique du terme. »
Dictionnaire juridique
Par conséquent, le locataire peut céder son bail soit en cédant son fonds de commerce, soit en cédant le droit au bail seul.
Un bailleur ne peut pas s’opposer à la vente du fonds de commerce à un nouveau locataire qui reprend l’activité commerciale et la clientèle de l’ancien locataire.
Il s’agit là d’une règle d’ordre public à laquelle aucune clause du contrat ne peut déroger.
Par cette règle, le législateur a voulu permettre au locataire sortant de valoriser le fruit de son travail, sans pouvoir en être empêché par son bailleur, contrairement à une cession de droit au bail seul.
Si le bailleur ne peut s’opposer à une cession du fonds de commerce, le bail peut toutefois contenir des clauses qui conditionnent et restreignent cette liberté : le plus souvent que le cessionnaire soit agréé par le bailleur en fonction de sa solvabilité ou de son d’honorabilité.
Un refus du bailleur ne peut être justifié que par le non-respect des critères énoncés dans ces clauses.
À défaut, il peut être sanctionné pour abus de droit.
Un commerçant peut céder son droit au bail sans être obligé de l'englober dans la vente du fonds de commerce.
C'est-à-dire qu'il va céder son bail tout en gardant la propriété du fonds de commerce. Il ne cède pas la clientèle, les outils de production ou l'enseigne, mais uniquement le droit de se maintenir dans le local vis-à-vis du bailleur.
Lorsque le locataire cède son bail seul, l'accord du bailleur est nécessaire.
De ce fait, il est tout à fait possible d'insérer dans le contrat de bail une clause qui interdit au locataire (initial) de céder son droit au bail indépendamment du fonds de commerce. L'insertion de cette clause dans le contrat se justifie par le fait qu'une cession isolée du droit au bail entraîne souvent le changement de l'activité initialement pratiquée dans le local commercial.
Les baux commerciaux comportent généralement une clause stipulant qu’en cas de cession du fonds de commerce ou du droit au bail, le cédant est tenu solidairement au paiement des loyers et charges du cessionnaire.
Avant le 20 juin 2014, cette obligation s’entendait pendant toute la durée du bail même en cas de prolongation tacite de celui-ci.
La loi Pinel du 20 juin 2014 est venue limiter la garantie solidaire du cédant au bénéfice du bailleur à 3 ans à compter de la cession du bail ou du fonds de commerce.
- Dans un premier temps, il est apparu que l’article limitant la garantie pouvait ne pas relever des dispositions de l’ordre public.
- Une clause exonératoire du droit commun a donc été prévue, indiquant que les parties renonçaient au bénéfice de cet article.
- Mais, un arrêt de la Cour de cassation (11 avril 29019) est venu redonner pleine efficience à l’article en affirmant qu’il « revêt un caractère d’ordre public ».
Inutile donc pour les bailleurs, qui souhaiteraient bénéficier d’une garantie sur de nombreuses années, d’essayer de déroger à cette règle comme certains peuvent le conseiller, en inscrivant une clause contraire dans le bail.
Pour les contrats de bail commercial conclus après le 20 juin 2014, la clause de garantie solidaire ne pourra s’appliquer que pendant 3 ans.
En cas de clause contraire, celle-ci sera réputée non écrite.
Le produit tiré de la vente du droit au bail est imposé au titre des bénéfices industriels et commerciaux (BIC)
Il est considéré comme un produit courant de l’entreprise et n’est pas imposé selon des règles particulières.
Le droit au bail est enregistré à l’actif du bilan comme immobilisation incorporelle. Son amortissement n’est pas reconnu par l’administration fiscale.
Le bail à l’américaine ne comporte ni droit au bail ni pas-de-porte.
Le locataire entrant n’a pas à payer de supplément de loyer ou une autre contrepartie pécuniaire au locataire sortant ou au propriétaire-bailleur pour entrer dans le local commercial.
La somme à verser au départ est moins importante, mais le montant du loyer est plus élevé puisqu’il est composé du prix de la valeur locative des lieux auquel s’ajoute l’amortissement d’un droit d’entrée
Le bail à l’américaine n’offre aucune garantie au locataire sur les modalités de révision du loyer lors du renouvellement du bail et, en cas de cession de bail, il ne pourra pas vendre un droit au bail à son successeur.